MarieChantal Chassé et la mêlée de presse : des cas à étudier

Dans les derniers jours les médias ont beaucoup discuté du retrait de la ministre de l’Environnement, Mme Chassé, après qu’elle ait connu des difficultés lors d’une mêlée de presse sur les fonds verts et dans ses quelques sorties dans les médias. Il faut d’abord voir de «l’autre côté», de celui des conseillers qui préparent une mêlée de presse ou qui la gèrent (oui ça se gère) pour avoir le portrait complet des difficultés liées à cet exercice.

Dans le cadre d’au moins deux emplois, j’ai eu à gérer plusieurs mêlées de presse, à la ville de Montréal et chez VIA Rail. Fort heureusement pour moi dans le premier cas, à la ville de Montréal j’ai bénéficié de l’expérience stratégique de Richard Thériault, directeur du cabinet du maire, devenu mon directeur des communications. J’ai appris deux choses importantes avec Thériault : de un, devant les journalistes on n’improvise jamais et de deux, chaque matin en relations publiques, il faut prévoir les coups possibles en analysant l’actualité. Comment se préparer pour une mêlée de presse? Il y a quelques étapes, mais un principe général qu’il ne faut pas oublier : vous n’êtes pas là pour répondre passivement à des questions, vous êtes là pour transmettre une réponse à une déclaration précédente et possiblement prendre des questions. Oui, j’entends bien vos cris de protestation à cette dernière remarque.

Pour une mêlée pas confuse…

La première mêlée de Mme Chassé semblait n’avoir pour but que de répondre aux médias sur la question des surplus liés aux fonds verts. On pourrait d’abord se demander si le choix de faire une mêlée de presse, pour une nouvelle ministre pas encore au fait des détails de ses dossiers et surtout, qui n’avait pas encore connu de pareil exercice, était judicieux. Une réponse écrite, un communiqué ou un message personnel par courriel aurait peut-être été suffisant (pas pour les représentants des médias qui l’auraient noté dans leur reportage ou leur article), mais on a choisi la voie de la rencontre en direct. Or, pour avoir un résultat correct qui n’aurait pas terminé en vidéo virale sur la maladresse de la ministre, il aurait fallu se présenter aux médias avec une réponse claire, donc des lignes de presse, apprises au besoin.

Pour un pareil exercice, il n’aurait pas été exclus avant de s’adresser aux médias de parler aux porte-parole des organisations en vue sur les questions environnementales. Pensons seulement à Steven Guilbeault, coprésident du Conseil consultatif fédéral en matière de lutte contre les changements climatiques ou Patrick Bonin de la campagne Climat-Énergie et Arctique à Greenpeace Canada. Souvent, les représentants de ces organismes, puisque c’est leur mandat, fourniront une position claire sur ces dossiers, ce qui permet ensuite de mettre par écrit un message qui tient en compte les lignes du gouvernment (ok, on peut présumer que le gouvernement caquiste n’en n’avait peut-être pas) et les demandes des organismes de la société civile. Les journalistes les contacteront ensuite pour avoir leur déclaration sur votre sortie de presse.

Gérer une mêlée de presse

Ce n’est pas parce que l’exercice se fait sans le décorum d’une conférence de presse, petits fours et dossiers de presse, qu’il faut pour autant tout laisser aller. Un relationniste d’expérience gère la mêlée de presse, prescrit l’ordre des questions et met fin à l’exercice quand son porte-parole lui fait signe. Je me rappelle avoir géré une mêlée de presse avec Jean Chrétien, devant l’Espace Shawinigan, où avait lieu l’ouverture d’une grande exposition du Musée du beaux-arts du Canada, Cai Guo-Qiang en 2006. Or, en mai 2006, nous étions en plein Shawinigate, un procès autour de cette affaire débutant en juin 2006. Tous les médias généralistes de la région étaient là, non pas pour voir les œuvres de l’artiste vedette chinois, mais pour capter un clip de Jean Chrétien. La femme de M. Chrétien ne voulait pas qu’il parle aux médias, mais il a insisté. Elle m’a donc demandé de l’encadrer. Encadrer Jean Chrétien, c’est un grand mandat. J’ai demandé aux médias de poser leurs questions un à la fois et quand M. Chrétien a terminé de répondre aux principales questions et que le ton a monté, sa femme m’a fait signe d’arrêter le tout. J’ai pris M. Chrétien par le bras, j’ai mis mon autre bras devant les caméras et j’ai dit très fort «vous êtes attendus à l’ouverture» et en regardant les journalistes, «je suis désolée, mais M. Chrétien n’est plus disponible». Les journalistes m’ont un peu tarabustée, mais bon avec les années on prend cela avec un grain de sel… C’est la seule mêlée de presse complètement improvisée que j’ai tenue, hormis peut-être notre sortie impromptue avec feu René Lafresnière, alors à la SQ, sur le chemin du retour de New York, un certain 12 septembre 2001…

Bref, je pourrais y aller d’anedcotes, de décorticage de cas, mais dans les deux exemples ici mentionnés, la revue de presse du jour ou de la semaine, nous informait déjà que les journalistes voudraient obtenir plus d’information sur un sujet précis. Comment vous répondrez, par une mêlée de presse, par un communiqué, par deux ou trois entrevues sur invitation (oui, ça se fait, même si les médias détestent que les gens de RP fassent cela) c’est à vous le déterminer, mais soyez conscients que la forme de votre message comme sa livraison sera commentée par les médias. Ils ont un boulot à faire, les gens de RP en ont un aussi. Alors la naïveté et la candeur devant les médias, à moins d’être un enfant, on laisse faire 😉

 

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